MÉMOIRE DE PAPIER
Mémoire de papier est un projet d’exposition / performance ayant pour origine un questionnement autour de l’idée de frontière(s).
Derrière la notion de frontière, il y a l’indéniable volonté de compartimenter le tout pour créer du multiple. Elle se traduit spatialement par une division, une mise à distance d’une chose à une autre.
De part et d’autre de cette zone, physique, politique, symbolique se trouvent des identités qui se distinguent les unes des autres. De cette division il peut y avoir duo ou dualité, selon que ce segment qu’est la frontière soit jointure ou séparation.
Notre attention se porte sur la cathédrale de Strasbourg. Au delà du symbole graphique dans la ville, l’édifice est une zone où convergent les regards, un espace figé que capturent des milliers d’appareils photo chaque année, une icône de pierre que notre projet cherche à provoquer en dialoguant avec sa façade.
Nous voulons réactiver notre manière de percevoir cet édifice en venant créer sur la place de la cathédrale une exposition de costumes de papier, s’inspirant des formes et des motifs, de la peau de l’architecture. Ces costumes sont des fragments, des mimes, tentatives de personnification de l’édifice, des habitats éphémères que les danseurs incarnent le temps d’une représentation. Temps à la fin duquel ils se déchirent et disparaissent.
Ainsi notre projet cherche à développer un vocabulaire de forme et contre-forme, de temps et contre-temps entre le monument de pierre et l’habit de papier.
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Les spectateurs, visiteurs, avertis ou non de la représentation se trouvent sur le parvis de la cathédrale à la tombée du jour.
Dans la foule, passante, stagnante, des figures blanches apparaissent peu à peu.
Ce sont des danseurs que des costumiers habillent de vêtements en papier taillés sur place, agrafés sur mesure en quelques minutes.
Les danseurs se déplacent prudemment, lentement, pour ne rien déchirer de leurs fragiles enveloppes. Leurs gestes contrariés créent une arythmie, suscitant l’attention des spectateurs et la curiosité des visiteurs.
Ils déambulent à travers la foule, prennent la pause, s’animent pas à pas.
Leurs mouvements, déterminés par la forme de leurs costumes, dialoguent avec le contexte dans lequel ils s’inscrivent : les postures des spectateurs, les figures et les formes gothiques de la cathédrale.
Leurs gestes deviennent de plus en plus dansés, progressivement les costumes se déchirent, les corps muent.
Au sol, les vêtements de papier continuent de se mouvoir agités par le vent. Ils deviennent de frêles sculptures exposées au pied de l’édifice.
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